Texte lu par Henri Gohin lors du concert donné à Boissy-l’Aillerie le samedi 5 mai 2018

 

Nous célébrons aujourd’hui une personnalité réellement hors du commun : Claire Soubeyran.

Claire n’était pas seulement une amie fidèle pour beaucoup d’entre nous, elle était aussi une chanteuse talentueuse et passionnée et une grande professionnelle dans sa spécialité, la facture de flûtes traversières baroques, classiques et romantiques. Elle a apporté une contribution décisive à la redécouverte de la flûte traversière, depuis le 17e siècle jusqu’à sa forme contemporaine.

Ce qui vient à l’esprit de façon évidente quand on cherche à définir Claire, c’est son goût de l’échange et du partage : par le chant bien sûr, sous toutes ses formes, mais aussi dans son métier de facteur qu’elle a exercé dans le même esprit.

Le parcours de Claire Soubeyran est une suite de rencontres d’une grande richesse qui l’ont menée de l’atelier du facteur Claude Monin, qui lui enseigna les bases de son métier, au musée de la musique pour la recherche organologique (elle a beaucoup travaillé sur le matériel historique) et à la Smithonian Institution à Washington pour l’étude des matériaux anciens, mais aussi tous les musiciens avec lesquels elle a noué des partenariats et des liens d’amitié, sans oublier ses collègues facteurs qui enrichissaient son expérience professionnelle et réciproquement, pour le plus grand bien de la facture historique. À chaque fois ou presque, l’amitié était au rendez-vous, comme une évidence, et s’installait durablement.

On peut dire que la musique a véritablement rempli la vie de Claire et notamment le travail du son − sa qualité, sa plénitude, sa magie − auquel elle a consacré toute son énergie dans le chant comme dans la facture instrumentale, ces deux aspects se complétant naturellement. Claire avait un sens du détail et une vive curiosité, alliés à un réel talent et beaucoup d’opiniâtreté, qui se reflétaient largement sur la qualité de son travail.

Claire a exploré à peu près tout l’éventail de la flûte traversière historique, du modèle baroque à une clé à la flûte conique système Boehm, en passant par la conception d’un modèle pour la production en série ou un autre dédié à l’apprentissage précoce du traverso.

Le chant était l’autre grande affaire de sa vie, un temps professionnel notamment avec la Pierre qui chante. Claire a énormément exploré, pratiqué et enseigné le chant populaire polyphonique, en y mettant toute son énergie et son sens du partage.

Ainsi, nous tous, chanteurs, flûtistes, clowns, famille, collègues et amis proches ou lointains, nous aurons côtoyé, marché, chanté, rigolé (beaucoup) et échangé pour notre plus grand bien avec celle dont on pourrait dire avec Brassens : « Son trou dans l’eau jamais ne se refermera. »

Le concert donné à Boissy-l’Aillerie le samedi 5 mai 2018 est une illustration de son œuvre dans toutes ses dimensions.